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28 mars 2024

JOURNAL IMPACT EUROPEAN

"NOUS SOMMES UN JOURNAL INDÉPENDANT"

Le Président normal à l’Ecole Normale Supérieure. Invité par les étudiants, il leur conseille la lecture des « Lettres à Anne »

Une fois par mois, les étudiants de l’ENS organisent, dans le grand amphi de leur Ecole, une conférence avec une personnalité éminente.

Après Edwy Plenel, journaliste, président de Mediapart, intervenu le 20 février, c’est François Hollande qui, le 20 mars, s’est exprimé longuement devant une salle comble et attentive.

Il a d’abord souligné le fait que le pouvoir n’est pas seulement à l’Elysée mais également au niveau des corps intermédiaires, les représentants du peuple. Ceux-ci ne sont pas populaires actuellement, ils sont cependant utiles et doivent être respectés.

Etre un représentant du peuple, c’est prendre des décisions, assumer des responsabilités, avoir un éclairage sur des problèmes, donner une explication du monde, faire preuve de conviction et d’engagement.

« On a d’abord appelé le PS, le Parti des instituteurs, le Parti des barbus; de nos jours, ce terme a pris une connotation différente », a rappelé avec humour François Hollande.

Il a évoqué l’état d’urgence qui est resté associé à son quinquennat. Face à la menace terroriste persistante, ce régime d’exception – assignations à résidence, perquisitions, interdictions de séjour – s’est imposé après les attentats de janvier 2015. François Hollande aurait souhaité que cette mesure entre dans la Constitution, qu’elle soit une garantie contre le terrorisme, pas une menace pour les citoyens.

Après trois prorogations, une levée de l’état d’urgence est envisagée fin juillet 2016, après la promulgation de la loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et son financement.

François Hollande l’évoque lors de son allocution présidentielle du 14 juillet, mais la nuit suivante, a lieu le terrible attentat à Nice. Une nouvelle prorogation est annoncée. Il y eut ensuite, le 26 juillet, l’assassinat du prêtre Jacque Hamel, égorgé dans son église de St Etienne-du-Rouvray.
A propos de la déchéance de nationalité, il a souligné le risque de faire des apatrides.
S’interrogeant sur la justice préventive et sur les fichés S : doit-on les garder à vie en prison?

La France est intervenue en Syrie par voie aérienne pour frapper Daesh tout en préservant les populations civiles. Certains djihadistes français ont pu être tués.

François Hollande a ensuite débattu avec Christophe Prochasson, directeur de l’EHESS, auteur de nombreux travaux sur l’histoire de la Gauche.

Etre de Gauche aujourd’hui, c’est quoi?

C’est une vision du monde par rapport à l’histoire

La Gauche a longtemps célébré son passé, plus qu’elle ne l’a analysé.

Elle a 200 ans d’histoire. Avec Jaurès, elle a d’abord été réorganisatrice au temps de l’industrialisation et de la naissance du prolétariat. La libération des moeurs est aussi un thème qui pouvait la définir. Et la classe moyenne a succédé au prolétariat.

Et arrive 1981 avec l’accession de la Gauche au pouvoir. Elle est alors privée de ses caractéristiques d’avenir, la notion de progrès est contestée. Avec la critique de la raison et le relativisme qui s’instaurent, le fondement de ce courant politique n’existait plus.

« La social-démocratie en a terminé avec son projet, a affirmé François Hollande. Elle a accompli sa tâche, la construction d’un état providence.

Nous sommes à la fin d’un cycle. Il faut laisser la place. Mais à qui? »
En face du socialisme, modèle du libéralisme, du libre-échange, de l’écologie, s’est toujours trouvé le nationalisme. La contestation de la mondialisation entraîne vers les partis nationalistes. Partout dans le monde la social-démocratie est en danger.

Une régénération, une mutation profonde de la SD est-elle possible?

C’est une question majeure. Les inégalités se creusent, cela peut exploser.

La SD a une méthode et une finalité. Elle prône la planification, la liberté individuelle, la justice et la protection sociale avec des assurance vieillesse, maladie, chômage. Telles sont les garanties qu’elle peut offrir, apportant sécurité et stabilité.

Tandis que dans le monde, en Europe, on assiste au retour des nationalismes, la Gauche reste attachée à l’universalisme et à la République. Défendre la République est primordial.

Christophe Prochasson a évoqué la « trahison » de la Gauche avec François Mitterrand qui a préféré l’Europe au socialisme.

« Etes-vous responsable de la déconvenue de la Gauche? », interroge-t-il.

Léon Blum, Guy Mollet, François Mitterrand, avaient déjà subi les mêmes accusations.

François Hollande se considère responsable au même titre que les autres. On cherche toujours un traître. Dès qu’on exerce le pouvoir, on renonce, on compose, mais on ne renonce pas à l’idéal de transformation du monde.

On a parlé des « déçus du socialisme ». Certes, la Gauche n’a pas été à la hauteur de ses promesses ..  Il y a eu la réalité, les résultats, le chômage, le terrorisme, les questions de sécurité.

Selon François Hollande, il faut cesser de battre sa coulpe. L’adversaire, ce n’est pas soi-même, mais il faut changer. Il rappelle qu’un syndicaliste de la CGT, l’avait vivement interpellé : « Alors M. Hollande, c’est quand le changement? »

Le danger, ce sont les individus face à l’Etat qui renient le collectif et les corps intermédiaires.

Les Gilets Jaunes veulent tout changer, tout de suite, ils n’ont pas de projet d’avenir.

Le tout économique l’a emporté et le socialisme s’est trouvé réduit à la meilleure répartition des biens.
François Hollande a invité l’auditoire à relire Emile Durkheim, normalien, un des fondateurs de la sociologie moderne, qui a fait une analyse critique du monde social prenant en compte la morale, le fait religieux le philosophique.

Le vieux débat socialisme versus social-démocratie n’est plus d’actualité. L’entreprise a moins d’importance, ce n’est plus elle qu’on occupe, mais les ronds-points.

La Gauche ne peut pas revenir au pouvoir de façon mécanique, l’alternance, c’est fini.

Le Front National est actuellement le seul parti politique, l’ancien grand PR n’est plus qu’une fraction, une sensibilité, En Marche n’a pas de parti, pas de doctrine avec des militants, le parti de gauche n’existe plus, la France Insoumise, ce n’est pas un parti, c’est l’homme, Ruffin c’est « je fais du cinéma et je crois que je peux aller jusqu’au bout « …

François Hollande croit aux partis. Un parti, c’est une doctrine, une pensée, une vision du monde, de l’Histoire. Ce sont des des structures pour former les cadres, choisir des candidats pour faire vivre la démocratie.

Les étudiants lui ont proposé des citations qu’il a commentées, notamment la phrase de Napoléon Bonaparte : « on ne conduit un peuple qu’en lui montrant un avenir, un chef est un marchand d’espérances » François Hollande a dit préférer « porteur » à « marchand ».

A la fin de la conférence, à la question d’un étudiant : « Quel livre recommandez-vous  aux étudiants ici rassemblés? François Hollande a répondu : « Les Lettres à Anne » de François Mitterrand à Anne Pingeot.

C’est une grande et belle ne histoire d’amour, mais c’est aussi l’histoire d’un homme qui ne renonce jamais, qui a rendu possible l’impossible, offrir l’alternance à un pays, à la France. Sa ténacité et son courage sont un exemple.

La toute dernière question : « Envisagez-vous de vous représenter à la Mairie de Tulle? » – « Non, on ne repasse jamais par les mêmes chemins » …

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