Le cinéaste Jean-Pierre Mocky est mort, a annoncé sa famille ce jeudi. Né à Nice le 6 juillet 1933, il avait 86 ans. « Jean-Pierre Mocky est mort chez lui cet après-midi à 15h », a indiqué son gendre Jerôme Pierrat à l’AFP. Le décès du cinéaste a été confirmé par son fils, le comédien et metteur en scène Stanislas Nordey.
Sa date de naissance est déjà tout un roman, son vrai nom Jean-Paul Mokiejewski, il serait né à Nice le 6 juillet 1933, de parents émigrés polonais. Son père est juif, la mère catholique. Certaines biographies indiquent 1929 comme date de naissance, son père l’ayant vieilli pour lui permettre de voyager seul.
Enfant, il fait une apparition comme figurant dans Les Visiteurs du soir, de Marcel Carné, en 1942, tourné en partie aux studios de la Victorine, à Nice. Commence pour lui, après-guerre, une prolifique activité de figurant puis de rôles secondaires dans le cinéma français des années 1950 (Orphée, de Jean Cocteau ; Le Paradis des pilotes perdus, de Georges Lampin ; Le rouge est mis, de Gilles Grangier ; Le Gorille vous salue bien, de Bernard Borderie).
Jean-Pierre Mocky est ensuite admis au Conservatoire national supérieur d’art dramatique, où il rencontre Jean-Paul Belmondo, encouragé par Pierre Fresnay, il suit les cours de Louis Jouvet au Conservatoire d’art dramatique à Paris. Sa belle gueule aurait pu en faire un authentique jeune premier, mais le cinéma français de cette époque vit sur la gloire des vedettes du passé (Jean Gabin, Fernandel, Pierre Fresnay) et ne sait que faire de la plupart de ses nouveaux comédiens.
À partir de 1952, Jean-Pierre Mocky s’installe en Italie. Il est alors engagé par les studios Ponti-De Laurentiis, et se fait remarquer. Dans les années 50, il obtient deux stages de renom. Il travaille d’abord avec Federico Fellini sur La Strada, récompensé par l’Oscar du Meilleur film en langue étrangère en 1957.
Jean-Pierre Mocky poursuit alors son chemin sous la houlette d’un autre monstre sacré du cinéma : Luchino Visconti. Il assiste le réalisateur sur le tournage de Senso, où il a un petit rôle qui ne sera finalement pas crédité au générique. Jean-Pierre Mocky enchaîne ensuite les films et les succès avec Graziella de Giorgio Bianchi et Les Égarés de Francesco Maselli.
Acteur et réalisateur inclassable, il comptait à son actif près de 100 réalisations, dont plus de 60 longs-métrages et une quarantaine de téléfilms. Parmi ses acteurs fétiches, des monstres du cinéma français comme Jean Poiret et Michel Serrault. Il a également dirigé des stars comme Bourvil, Philippe Noiret, Catherine Deneuve ou Jeanne Moreau.
Loin de se laisser abattre, le réalisateur s’impose et sort en 1959 son premier film : Les Dragueurs, avec Jacques Charrier, Charles Aznavour et Anouk Aimée. Après la sortie des Dragueurs, il ne cessera plus de tourner. On lui doit des comédies déjantées comme Un drôle de paroissien avec Bourvil, dont l’entourage tente de dissuader l’acteur d’accepter le rôle, ou encore La Grande Lessive, toujours avec Bourvil.
Suivront d’ailleurs, dans la même veine, en 1960, Un couple, sur un scénario de Raymond Queneau et, en 1963, Les Vierges, sur le sujet, alors considéré comme scabreux, de la virginité des jeunes filles, conçu comme une sorte de suite des Dragueurs.
La reconnaissance commence à arriver en 1968 lorsque Henri Langlois et Bernard Martinand lui consacrent une rétrospective à la Cinémathèque française et parallèle des événements de Mai 68 qui secouent la France, Jean-Pierre Mocky change de registre et se tourne vers le film noir. Terroristes d’extrême gauche, corruption des hommes politiques, il réalise Solo, puis L’Albatros, où il joue les premiers rôles.
Mocky est aussi devenu un personnage médiatique, râleur et vitupérateur, régulièrement invité sur les plateaux de télévision pour donner son avis.
Il a construit un mécanisme totalement autarcique, produisant, distribuant, exploitant des œuvres tournées à toute allure et ne correspondant à aucun genre ou alors relevant de tous en même temps. Puisque le système ne veut plus de son cinéma, Mocky se passera du système et le narguera par sa productivité démesurée.
Maître de la dérision, auteur prolifique d’une oeuvre inégale, entre comédies grinçantes, satires des mœurs contemporaines, et polars, il était considéré comme « rebelle » du cinéma français, toujours sur la brèche, sempiternel grogneur et avant tout, libre.
Il avait reçu depuis 2010 plusieurs hommages et distinctions de la profession. « Leur effet sur moi est à peu près aussi durable qu’un pet sur une toile cirée », pestait ce « fauteur de troubles pour les uns, fouteur de merde pour les autres ».
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