La tolérance est le cheval de bataille des Emirats Arabes Unis, pour garantir la paix dans les pays du Golfe.
Après le 41ème sommet du Conseil de coopération du Golfe (CCG) du 5 janvier dernier, les Emirats Arabes Unis ont marqué leur position en faveur de la tolérance.
Le 41ème Conseil de coopération du Golfe
Pour cette dernière édition, l’Arabie Saoudite a invité officiellement l’émir du Qatar après 3 ans de froid entre les 2 pays. Doha avait rompu ses relations diplomatiques en juin 2017 avec l’Arabie Saoudite, les Emirats Arabes Unis, Bahreïn et l’Egypte. Le CCG accusait Doha de soutenir des mouvements islamistes et de semer le trouble dans la région. Koweït et Oman avaient servi de médiateurs.
Rappelons que l’an dernier, le cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, avait envoyé son Premier ministre à sa place. Sa présence, cette année marque une avancée vers une action commune et une coopération entre les pays membres du CCG.
La crise relationnelle entre les pays du Golfe a joué un rôle important sur les relations avec les Etats-Unis et Israël. Une nouvelle politique s’inscrit dans la région avec l’investiture du nouveau président américain. Mettre fin à ces discordes est le souhait des Emirats et de Bahreïn.
Qu’est-ce que le Conseil de Coopération du Golfe?
Le CCG a été créé le 25 mai 1981 sous l’impulsion de l’Arabie Saoudite et la pression des Etats-Unis. Son but est d’assurer la stabilité économique et politique dans la région du Golfe, l’Iran, l’Irak et la Syrie. Il se compose de l’Arabie saoudite, d’Oman, du Koweït, de Bahreïn, des Émirats arabes unis et du Qatar. Après la tentative de putsch à Bahreïn, les pays membres du CCG ont réuni leurs forces armées dès 1983. Ils organisent des manoeuvres communes (Le Bouclier de la Péninsule). Après les sommets de Koweït et Mascate, les unités interviennent sous une force de déploiement conjoint dont le quartier général sous l’ordre d’un général saoudien, se trouve dans le nord de l’Arabie Saoudite à Hafar Al-Batin,
A cette époque, les ministres de la défense réactivent le projet de l’Organisation des Industries Arabes (OIA), impliquant l’Egypte. Ils construisent plusieurs usines d’armement (munitions, armes légères et blindés légers) sous licence brésilienne.
Durant le « Printemps arabe « (2010-2012), le CCG a proposé d’intégrer les royaumes du Maroc et de Jordanie avant de retirer sa proposition, mais en créant un fonds du Golfe Arabique pour le développement.
Les autres coopérations
À la fin de la guerre Iran-Irak (1980-1988), Saddam Hussein crée le Conseil de coopération arabe (CCA). Il regroupe la Jordanie, l’Irak, le Yémen du nord et l’Égypte.
Le 10 août 1990, les États du CCG soutiennent (sous un drapeau commun) le Koweït à la suite de son invasion par l’armée irakienne. La première « guerre du Golfe » éclate, opposant l’Irak à une coalition de 35 États, dirigée par les États-Unis. Elle est divisée en deux phases : l’opération « Bouclier du désert » (2 août 1990 -17 janvier 1991) où les troupes défendent l’Arabie Saoudite, et l’opération « Tempête du désert » (17 janvier- 28 février 1991). Les forces de la coalition parviennent à repousser l’armée irakienne et les bombardements contre l’Arabie Saoudite et Israël.
La seconde « guerre du Golfe » commence en 2003. Elle oppose une coalition menée par les Etats-Unis au parti mené par Saddam Hussein. Officiellement finie 2 mois après, elle voit le retrait des troupes américaines entre 2008 et 2011.
2003: chute de Saddam Hussein et fin du CCA, le Yémen entame des négociations pour rejoindre le Conseil de coopération du Golfe.
2007, le comité de santé du CCG intervient après la progression de la grippe aviaire (virus H5N1 HP) au Koweït.
1er janvier 2008: ouverture officielle du Marché commun du Golfe (union économique entre les six monarchies du Golfe Persique. Il a pour but d’ouvrir les frontières aux personnes, capitaux et marchandises sur le modèle européen.
2009: l’Arabie saoudite, Bahreïn, Koweït et le Qatar, signent à Ryad un accord sur la création d’une union monétaire. Les Emirats Arabes Unis et Oman se retirent suite au choix de Ryad comme siège de la future Banque centrale.
2012, le ministre de la Défense irakien Saadoun al-Dulaimi déclare que l’Irak (soutenue par Koweit) veut rejoindre le CCG.
Les groupes intégristes
Durant toutes ces années, on a pu voir la montée de l’intégrisme et des groupes terroristes comme Al-Qaïda, Daesh (EI) ou les Frères musulmans. Le Moyen-Orient est devenu une poudrière. On peut y voir la montée du fondamentalisme religieux. Certains états comme l’Arabie Saoudite et Qatar sont soupçonnés de financement, contrairement aux Emirats Arabes Unis qui prônent la tolérance.
-Al-Qaïda: fondé en 1987 par Oussama ben Laden. Responsable des attaques du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, du 11 mars 2004 à Madrid et du 7 juillet 2005 à Londres. On retrouve ses principales branches au Yémen. L’organisation est aussi présente dans la péninsule arabique (Aqpa), au Maghreb (Aqmi), en Afrique (GSIM) et en Syrie (Front Al-Nosra) jusqu’en 2016.
-Etat Islamique (EI) ou Daesh: proclamé en juin 2014. Le califat de l’Etat Islamique sur un territoire s’étend de la Syrie à l’Irak.
-Les Frères musulmans: créé en Egypte dans les années 20 par Hassan al-Banna. L’organisation lutte contre la colonisation britannique et son modèle culturel occidental en s’appuyant sur les valeurs de l’islam et la culture arabe.
Position des Emirats Arabes Unis
Depuis 2017, Qatar s’est opposé à ses voisins suite à une crise politico-religieuse . Elle met en scène les relations entre l’Egypte, les « Frères musulmans » et les pays du golfe, depuis les années 1950. Les membres de la confrérie ont fui l’Egypte pour se réfugier en Arabie Saoudite et dans les pays du Golfe. Au début des années 90, les Frères musulmans deviennent des alliés naturels contre les mouvements arabes révolutionnaires. Ils contribuent à accroitre la légitimité panislamique de Riyadh.
Avec les révolutions arabes de 2011, les Frères musulmans et autres mouvements islamistes, soutenus par le Qatar et la Turquie, tendent à créer un nouvel ordre politique au Moyen-Orient. Contrairement, l’Arabie Saoudite et les Émirats s’appuient sur l’Egypte pour rétablir le dialogue.
L’action des Emirats
L’Arabie Saoudite et Qatar adhèrent à la doctrine wahhabite (retour aux pratiques en vigueur dans la communauté musulmane du prophète Mahomet et ses premiers successeurs ou califes). A l’opposé, les Emirats prônent de nouvelles institutions (le Conseil des sages musulmans et le Forum pour la promotion de la paix dans les sociétés musulmanes), nominalement indépendantes, dirigées par des personnalités éminentes du monde sunnite.
Les Émirats sont les initiateurs de la fondation Mu’minun bilâ Hudûd (Croyants sans frontières), dont le siège principal est à Rabat. Des intellectuels de tout le monde arabe y participent.
Création de nouveaux ministères
2016: Création du ministère du bonheur. Le ministre en charge est responsable des plans, des programmes et des politiques pour parvenir à une société plus heureuse. C’est aussi l’année de création du ministère de la tolérance.
Octobre 2017: Création du ministère de l’intelligence artificielle, quelques jours après le retour sur terre du premier astronaute émirien. Ouverture de la première université au monde entièrement dédiée à l’intelligence artificielle (IA). Visite u pape François pour renforcer le dialogue islamo-chrétien.
2019: Création du ministère des Possibilités, assumé par l’ensemble des membres du gouvernement. Il a pour mission, de réduire le temps d’attente dans les administrations et d’imaginer de nouveaux projets et systèmes pour le futur. Exposition « Highway Gallery 2.0 » le long de l’autoroute reliant Dubaï à Abu Dhabi. Cette manifestation a permis de voir l’esprit d’ouverture du musée du Louvre d’Abou Dhabi à travers 10 oeuvres en 3D. On pouvait découvrir une statue du X/XIème siècle représentant non pas Bouddha mais Guanyin, divinité de la compassion. La reproduction d’une statuette de la Princesse de Bactriane vieille de 4 000 ans, un manuscrit hindou du XVIIe siècle ou une œuvre de Van Gogh datée de 1888 appelée « La salle de danse à Arles »jalonnait le bord de l’autoroute.
En l’espace de 3 ans, le pays a pu mettre en valeur sa modernité et son ouverture d’esprit, tout en développant sa tolérance.
Visite du Pape en février 2019
Le Pape François s’est rendu aux Emirats en février 2017. Il y a célébré une messe en plein air devant près de 150 000 personnes dont 4 000 musulmans.
Les Emirats Arabes Unis comptent une population composée à plus de 85% d’expatriés. On compte 65% originaires de pays asiatiques, des Africains et des Européens.
Cette messe a montré le libéralisme du pays. La libre pratique de la religion (non musulmane) y est autorisée et acceptée .Gouvernement et la population respectent les différences tout en plaidant une compréhension mutuelle. Bouddhistes, chrétiens et hindous peuvent se rassembler pour prier et méditer.
Les relations controversées des Emirats
Malgré une image d’ouverture vers l’Europe et la France, les Emirats entretiennent des relations avec les milices salafistes en Lybie et au Yémen et la Tchétchénie. Les Emirats ont beaucoup investi dans le pays qui lutte contre « les Frères musulmans ».
A contrario, ils ont été très présents aux cotés de l’Hexagone dans la crise des caricatures (assassinat Samuel Paty), particulièrement contre la Turquie.
Le modèle de tolérance que montrent les Emirats est un rempart contre l’islamisme radical mais ne s’applique au pays lui -même. Aucun parti ni élections n’y sont tolérés. De plus, 10% des habitants sont des citoyens émiriens.
Les derniers accords
2020: Accords historiques entre Israël, les Emirats et Bahreïn, signés le 15 septembre à la Maison Blanche. La normalisation des relations entre les 3 pays annonce une ère nouvelle malgré les contestations de l’autorité palestinienne qui se sent trahie. La seule concession d’Israël est l’abandon de toute annexion supplémentaire en Cisjordanie.
Les « Accords d’Abraham » sont un enjeu économique dans cette région du Golfe. Le 26 novembre, le premier vol commercial entre Israël et les Emirats marquait une étape importante.
Après l’Egypte en 1979 et la Jordanie en 1994, les Émirats arabes unis sont le troisième pays arabe à reconnaître officiellement Israël. Elle espère d’ailleurs un rapprochement avec l’Arabie Saoudite et d’autre pays de la région.
La première ambassade d’Israël sera bientôt ouverte à Abu-Dhabi. Son premier représentant sera un diplomate qui officiait à Ankara, Eithan Naeh. Concernant les Emirat, l’ambassade devrait siéger à Tel Aviv. On note aussi l’exemption des visas dans les deux pays.
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