GÉRARD CROSSAY
Macron-Le Pen : la bataille d’Amiens.
Amiens, 13h.
Marine Le Pen, sans prévenir, arrive sur le site de Whirlpool où les ouvriers font un piquet de grève depuis lundi
pour protester contre la volonté de délocalisation de la société en Pologne, ce qui mettrait les 286 employés du site au chômage auxquels s’ajouteraient également 250 intérimaires et au moins une centaine de salariés de sous-traitants.
Dans le même temps, depuis midi, Emmanuel Macron rencontre l’intersyndicale des salariés de l’entreprise à la Chambre de Commerce d’Amiens.
Marine Le Pen est accueillie triomphalement aux cris de « Marine Présidente! ». Tout sourire, elle fait des selfies avec les ouvriers, les embrasse chaleureusement et leur fait part de ses propositions :
– l’usine ne fermera pas; non aux licenciements
– l’interdiction des délocalisations
– la fermeture des frontières
– la nationalisation de l’entreprise (proposition modifiée en « protection temporaire »à 16h30)
– le remboursement du CICE
La visite-éclair a duré une dizaine de minutes.
Amiens, 15h.
Emmanuel Macron arrive sur le parking de l’usine où les ouvriers bloquent l’accès poids lourds.
L’accueil est chaotique, le candidat est sifflé, durement interpellé. Il se fraie difficilement un passage au milieu de la foule des journalistes et des ouvriers jusqu’au grilles de l’usine qui sont alors fermées à la presse pour permettre à Emmanuel Macron de discuter avec les salariés en colère et désespérés.
Jusqu’à ce moment, BFM TV retransmet les images de l’événement. C’est ensuite le facebook du candidat qui prend le relais et l’on voit Emmanuel Macron, muni d’un porte-voix exposer ses propositions.
Il dit n’être pas venu promettre des monts et des merveilles. Il déclare entendre la colère mais se refuse à toute démagogie.
Durant 1h30, il va peu à peu parvenir à faire entendre un discours de raison, à effectuer un travail de pédagogie pour convaincre et exposer ses solutions :
– le refus de la nationalisation et de l’interdiction des licenciements
– l’homologation d’un plan social seulement s’il est « à la hauteur »
– la recherche d’un repreneur
– le reclassement, la formation
Il est alors interpellé par François Ruffin, célèbre journaliste-documentariste, porte-parole des déshérités depuis la réalisation de son film « Merci Patron », qui dénonce à nouveau les paradis fiscaux ainsi que l’énormité des dividendes versés par Whirlpool à ses actionnaires sur le dos des salariés qui en sont à leur troisième PSE (plan de sauvegarde de l’emploi)
Piège tendu par Marine le Pen pour mener le jeu et obliger Emmanuel Macron à venir sur le site dans un contexte difficile?
Habileté d’Emmanuel Macron qui a opposé exploitation politique et médiatique à travail de fond sur les dossiers et dialogue de raison avec les salariés?
Quoi qu’il en soit, aujourd’hui, à Amiens, on a assisté à une scène violente, intense, à une véritable bataille politique analogue à celle qui se mène dans le monde face à la mondialisation, face aux tensions et aux souffrances qu’elle entraîne.
C’est aussi pour les deux candidats l’entrée dans le dur de la campagne, la volonté de s’affronter sans détours et d’affirmer chacun avec force sa vision de la société.
Emmanuel Macron s’est ensuite rendu à Arras où il tenait ce soir un meeting.
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