La ligne 11 de métro, Mairie des Lilas-Châtelet, se prolonge vers l’est et se modernise, ce qui entraîne des travaux titanesques dans les stations existantes.
« Des trous, des p’tits trous, encore des p’tits trous … » chantait Gainsbourg en 1959 dans sa célèbre chanson « Le poinçonneur des Lilas ».
C’est ce que fait sans relâche – « paraît qu’y a pas d’sot métier » – cet ouvrier du groupe Fayat, 4ème entreprise française du bâtiment et des travaux publics, après Vinci, Bouygues et Eiffage, à l’aide de son énorme machine, appelée « foreuse », sorte de pince à poinçonner les tickets RATP … pardon, plutôt sorte de gigantesque perforateur.
Car il faut effectivement faire des trous pour permettre aux trains et aux voyageurs de circuler sous terre.
Ceux-ci, cependant, ne passeront pas par ces trous, gigantesques puits verticaux.
Ainsi, à la station Pyrénées – ce n’est pas le Pic du Midi, mais on est quand même sur les hauteurs de Belleville – , ce monstre creuse des trous de 60cm de diamètre et 25m de profondeur, emplis ensuite d’armatures de fer et d’un béton spécial fondations qui sèche sans air en profondeur.
Le but est de créer l’assise d’un grand espace bétonné, future galerie agrandissant la station, et de soutenir les sols dans cet espace densément construit.
Vingt-cinq trous en tout.
Il est intéressant d’observer les matériaux extraits du sol par le monstre.
Ce sont d’abord du remblai sur 1m, puis 3 couches de marnes de différentes couleurs et, à partir de 18m, du gypse.
Le gypse a été fortement exploité pour fabriquer le Plâtre de Paris, plâtre de très bonne qualité.
En 1697, le roi Louis XIV oblige les propriétaires de maisons pourvues de colombages en bois à couvrir ceux-ci de plâtre, pour limiter les incendies et, à la même époque, les plafonds blancs et lisses deviennent à la mode.
Il s’ensuit une augmentation considérable de la consommation de gypse.
Au Sud de la Seine, Paris extrayait ses pierres calcaires pour bâtir la ville.
Au Nord, pas de carrière de pierre mais du gypse, omniprésent, en bancs homogènes et de grande hauteur.
Il fut exploité dans toutes les buttes du Nord de Paris, soit à ciel ouvert, soit en creusant de grandes entrées à flanc de colline, parfois de plus de 10 mètres de haut lorsque l’exploitation se poursuivait en souterrain, ce qui fut très préjudiciable à la stabilité des terrains, comme aux Buttes Chaumont et Montmartre, et entraîna des effondrements.
On trouvait aussi de la meulière, roche siliceuse qui servait autrefois à faire des meules lorsqu’elle était compacte, d’où son nom. Mais le plus souvent elle comportait de gros trous et a servi alors à bâtir les murs des pavillons de banlieue parisiens à la fin du XIXème siècle.
Au dessus du gypse, on trouvait l’argile qui a servi à faire des tuiles et des briques.
Enfin, encore au-dessus, des couches de marnes qui retiennent les eaux, créant ces nappes phréatiques perchées qui ont alimenté les nombreuses sources autrefois exploitées des collines de Ménilmontant, Belleville et Montmartre.
Des trous, des p’tits trous, encore des p’tits trous, … il en a été creusé pour exploiter toutes ces carrières jusqu’à la fin du XIXème siècle et capter l’eau des sources !
Et encore des trous pour construire le métro à partir de 1898.
Et maintenant, on creuse à nouveau pour la modernisation et l’extension du réseau de la RATP, la Régie Autonome des Trous Parisiens.
Pour le voisinage, le bruit occasionné par ces chantiers, surtout par cette monstrueuse « foreuse », est parfois insoutenable.
« Y a d’quoi devenir dingue, de quoi prendre un flingue, s’faire un trou, un p’tit trou, un dernier p’tit trou … »
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