Emmanuel Macron fait le show en 2 heures de tous les candidats à la présidentielle, rééditant les projets de chacun dans une vision claire et révolutionnaire, très collective et associative.
Seul grand rassemblement d’une campagne de premier tour d’Emmanuel Macron en panne de dynamique, c’est peu de dire que le meeting organisé à Paris – La Défense Arena, ce samedi, était attendu.
Un show « à l’américaine ». C’est vrai que la disposition de la salle, avec une scène centrale en forme d’hexagone, son grand écran en fond, avait de quoi faire penser à une convention présidentielle américaine, mais réalisé en scénario français.
Emmanuel Macron a vanté son bilan, présenté son projet, abordé tous les thèmes du programme, salué ses soutiens et attaqué ses adversaires, particulièrement ceux d’extrême droite, mais a repris les idées des partis de gauche.
Ce ne fut pas tellement révolutionnaire : le candidat a déclamé, prompteurs à l’appui, un discours de deux bonnes heures, arpentant la scène centrale d’un pupitre à l’autre, face à une salle enthousiaste mais pas totalement remplie.
Le président-candidat lui, trace sa route, sans commenter les sondages. Pendant 2 heures 20, drogué à lui-même, il empile les antiennes macronistes, les concepts creux, évoquant « le laboratoire de la volonté », « les militants de l’idéal », « le combat du progrès contre le repli », « le dépassement, qui n’est pas un effacement des différences, mais qui se nourrit des inspirations de chacun » – comprendra qui pourra.
Outre les 300 députés et 1 500 élus locaux présents sur les lieux, plus de 30 000 personnes étaient attendues dans une salle pouvant en contenir 40 000. La jauge a-t-elle été atteinte ? Pour y parvenir, ses équipes se sont notamment démarquées en organisant un concours pour récompenser par des goodies ou un « moment spécial après le meeting », les militants qui ont convaincu le plus de monde de se rendre au rassemblement.
Après cinq ans à la tête du pays, Emmanuel Macron, candidat officiel à la présidentielle depuis moins d’un mois, reste à ce jour le concurrent qui semble le mieux placé pour remporter l’élection, selon les résultats des sondages qui le donnent tous en tête, avec en moyenne 29% des intentions de vote au premier tour, et une victoire, quel que soit son adversaire, au second, avec entre 55% et 65% des voix.
En coulisses toutefois, le doute est susceptible de s’immiscer : une étude Elabe parue mercredi a montré pour la première fois une superposition des marges d’erreur entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron en cas de second tour les opposant.
En meeting mercredi 30 mars dans le Val-de-Marne, l’ancien Premier ministre a exhorté les électeurs à se mobiliser. Pour lui, le scénario d’une défaite d’Emmanuel Macron n’est pas à écarter.
Le président sortant a tout d’abord tenté de dresser un bilan de son premier mandat : « C’était notre projet, et c’est maintenant notre bilan, nous l’avons fait », s’est félicité Emmanuel Macron. Et d’ajouter : « Malgré les crises, nous avons tenus nos promesses. (…) Le taux de chômage est au plus bas depuis 15 ans. »
Ainsi Emmanuel Macron a voulu mettre en avant un « projet de droits réel, de solidarité, de progrès social ». Un projet qui s’appuiera sur des mesures telle que le triplement de la prime Macron, l’augmentation de 50% de l’aide pour les mères seules, une prime de pouvoir d’achat allant jusqu’à mille euros, ou encore le recrutement de 50 000 infirmiers et aides-soignants ainsi que le renforcement des contrôles pour garantir la dignité des personnes âgées.
Finalement, le président-candidat, peu présent dans la campagne, a choisi de concentrer ses interventions en prenant son temps: il avait déjà passé presque quatre heures en conférence de presse le 17 février. Après avoir, ce jour-là, penché clairement à droite (RSA sous condition, retraite à 65 ans…), Emmanuel Macron a semblé ce samedi jouer sur un autre registre. Il a dénoncé les inégalités qui règnent dans le pays.
«Le vrai pouvoir d’achat, c’est celui qui vient du travail», a affirmé Emmanuel Macron. Pour son deuxième quinquennat, en cas de réélection, le président mettra en place une prime de pouvoir d’achat pour les travailleurs pouvant aller jusqu’à 6.000 euros.
«Dès cet été, je veux permettre aux travailleurs de toucher une prime de pouvoir d’achat pouvant aller jusqu’à 6.000 euros sans charges ni impôts», a-t-il annoncé.
«Les travailleurs indépendants gagneront davantage, 550 euros de plus chaque année au niveau du Smic. (…) À nouveau, ces cinq années de plus doivent être les cinq années du travail, du mérite, de la liberté, nous devons continuer d’avancer, et nous créerons le compte-épargne temps universel», a-t-il ajouté.
Le président-candidat est revenu sur ce qu’il compte changer dans le système éducatif français.
«Nous renforcerons l’enseignement du français et des mathématiques jusqu’au baccalauréat, nous généraliserons le sport à l’école avec une demi-heure de sport par jour à l’école dès septembre, nous ferons une révolution complète du lycée professionnel, une voie d’excellence», a-t-il dit.
Autres secteurs évoqués : l’éducation et la santé, deux domaines touchés par la crise sanitaire. « L’ascenseur social reste encore trop en panne », a-t-il admis. Pour la santé, « nous devons aller plus loin », a également concédé Emmanuel Macron. Il a tenu à rendre hommage aussi bien aux corps enseignants, les « artisans de la République » qu’aux personnels de santé, qui doivent faire face à « l’épuisement ».
Plus axé sur le social, Macron précise ses réformes du RSA et des retraites
Emmanuel Macron est également revenu sur ses promesses de baisse des impôts et de retour au plein emploi tout en précisant sa proposition de réforme du RSA. « Nous mettrons en place pour les bénéficiaires, des activités de formation, d’insertion, de réinsertion » et « il ne s’agit pas, comme l’ont prétendu certains, de travaux d’intérêt général, encore moins de vouloir couper des aides à ceux que la vie a trop abîmés ».
«Nous continuerons de mener les réformes indispensables sur l’assurance-chômage (…) de donner plus de liberté à tous nos entrepreneurs (…). Nous mettrons en place pour les bénéficiaires du RSA de 15 à 20 heures par semaine des activités de formation, de réinsertion sur le modèle de ce que nous faisons depuis le 1er mars avec le contrat d’engagement jeunes pour les 18-25 ans».
Il défend le recul de l’âge de la retraite à 65 ans, il en a profité pour étriller ses adversaires, très critiques envers cette proposition. « Ne croyez pas ceux qui vous expliquent qu’ils feront la retraite à 60 ans ou à 62 ans, (…) et que tout ira bien, ce n’est pas vrai », a-t-il martelé.
Après avoir été critiqué ces dernières semaines pour n’avoir présenté jusqu’à présent que des mesures de droite, au point d’être accusé par Valérie Pécresse de reprendre son programme, Emmanuel Macron a lancé quelques clins d’œil à la gauche avec une partie de son discours consacrée au pouvoir d’achat. Son projet de 2022 est, assure t-il, un projet de « droits réels, de solidarité, de progrès social. » Il va même plus loin en laissant entendre qu’il est un candidat antisystème : « Le système viendra nous dire que c’est impossible, et nous le ferons ! »
De plus, le candidat a rendu hommage aux soignants pour leur mobilisation lors de la crise sanitaire.
«J’ai une pensée pour eux, émue, mobilisés, parce qu’ils continuent de se battre dans les hôpitaux, dans leur cabinet, pas simplement contre le Covid qui continue à sévir, contre les formes de Covid long, et contre toutes les maladies que nous ne pouvons pas oublier, applaudissez nos soignants», a-t-il dit.
Il prône une « France unie », qui « se regarde en face, dans sa pluralité », et ainsi, après un autre clin d’œil appuyé aux socialistes en intégrant le slogan de François Mitterand de 1981 (« Il n’y a pas plus puissant que la force tranquille de la fraternité »), il appelle à « ne pas diluer nos forces dans les divisions ».
Le chef de l’Etat a tenu à dire quelques mots pour son entourage le plus proche. «A tous, je veux qu’ils sachent la place qu’ils ont prises à mes côtés, je ne le dis pas, je le sais, suffisamment, je le dis parfois mal, mais de celles et ceux des premiers combats impossibles jusqu’à celles et ceux qui ont rejoint ces derniers semaines» a déclaré Emmanuel Macron afin de saluer tous ses soutiens.
Il a ensuite remercié sa famille : «Je veux que ma famille, mes parents, nos enfants, nos petits-enfants, mes frères et sœurs, tous ceux à qui je fais vivre depuis tant d’années des vies de contrainte qu’ils n’ont pas choisies, je veux leur dire simplement ma reconnaissance et mon affection, merci».
Emmanuel Macron a rendu hommage à son épouse : «Et puis, vous savez tous, sans qu’il soit besoin d’en dire plus, la présence de celle qui m’importe le plus, qui m’apporte le plus dans cette singulière aventure de vie, Brigitte».
Emmanuel Macron a rappelé l’importance de se mobiliser face à la montée de l’extrême droite : « Nous nous sommes habitués à voir défiler sur certains plateaux de télévision des auteurs antisémites, d’autres racistes, magnant à longueur de journées, ne les sifflez pas, combattez-les par les idées, avec respect. »
Plus clairement encore, Emmanuel Macron a évoqué le « danger extrémiste » et « la haine » et les « vérités alternatives » qui se sont banalisées, à travers « certains plateaux de télévision » qui font défiler « des auteurs antisémites, d’autres racistes ». Une pique qui a provoqué la réaction d’Eric Zemmour, invitant le chef de l’Etat à débattre avec lui.
Le candidat a tenu à souligner qu’il n’était pas de ceux « qui attisent les peurs et cherchent des bouc-émissaires, cela ne sert à rien » alors qu’il a évoqué à de nombreuses reprises la guerre en Ukraine.
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