Gabriel MIHAI
La 19e édition de l’Art Paris Art Fair, a ouvert au Grand Palais ce jeudi et se tient jusqu’au 2 avril avec ses 139 exposants venus de 29 pays, elle n’a certes pas le prestige de la Fiac , mais force est de constater qu’elle engendre une belle dynamique auprès d’amateurs éclairés.
Cette semaine, la foire de printemps est au rendez-vous sous la verrière du Grand Palais, avec ce mixe d’art moderne et d’art contemporain, cette année de baromètre pour un marché encore très balbutiant en Afrique, mais de plus en plus dynamique en Europe et en particulier en France.
Elle met cette fois-ci la capitale à l’heure africaine, du musée du Quai Branly, au festival 100% Afrique de la Villette, en passant bientôt par l’Institut du monde arabe, une exposition chez Sotheby’s et une vente chez Piasa.
En France, l’année 2017 semble être dédiée aux créations venant de ou inspirées de l’Afrique. Pourtant, à Art Paris, la grande foire pour l’art moderne et contemporain, aucun drapeau aux couleurs africaines ne flotte devant le Grand Palais. Même après avoir franchi les portes d’entrée majestueuses de la grande nef, il n’y a nulle part des signes ostentatoires d’un focus Afrique à l’horizon.
Les artistes du Focus Afrique sont dispersés un peu partout dans le Grand Palais, à l’image de la galerie Nathalie Obadia où des photographies du monument malien Seydou Keïta côtoient les tirages de Laure Prouvost, artiste française vivant à Londres, lauréate du prestigieux Turner Prize en 2013. Marie-Ann Yemsi, la commissaire invitée de ce focus « L’Afrique à l’honneur » souhaite aller à l’encontre d’une Afrique exotique :
« Il s’agit pour moi d’offrir de nouvelles perspectives sur le continent africain. En France, on a accumulé un retard sur le regard qu’on porte sur ce continent. On est encore dans une ’exotisation’, dans une Afrique plus fantasmée qu’une Afrique réelle. Ces projections, ces idées erronées ou préconçues rejaillissent aussi sur les artistes contemporains du continent africain. »
Ce fin connaisseur du marché de l’art observe « un mouvement mondial lié à l’essor de l’Afrique et à la reconnaissance d’une nouvelle génération d’artistes nés dans les années 1970-1980, qui ont grandi avec Internet et bénéficié de résidences dans le monde. Paris a tardé à regarder l’Afrique contemporaine et opère un rattrapage ». Même si la capitale a déjà accueilli des expositions majeures – Magiciens de la terre en 1989, Africa Remix en 2005, Beauté Congo en 2015 ou Seydou Keita en 2016 – rien à voir avec Londres, devenue « l’une des têtes de pont pour les galeries liées à l’Afrique et la foire spécialisée 1:54 créée il y a quatre ans et exportée depuis à New York », précise encore Guillaume Piens. La foire AKAA a lancé toutefois sa première édition en 2016 avec succès au Carreau du Temple.
La tension des identités est également palpable dans la série Mangbetu du jeune Congolais Eddy Kamuanga Illunga. A 26 ans, il vit entre Bruxelles et Kinshasa où il a son atelier. «Mangbetu est un peuple du nord-est du Congo qui a énormément souffert de la colonisation. À cause de leurs longues têtes, leur beauté et la splendeur de leurs coiffes, ils ont été souvent représentés pendant la colonisation sur des affiches, sur la monnaie ou les cartes postales. Ils ont connu un certain « succès » en Europe et ont été appelés « Mangbetu » par les Belges. Quand j’ai découvert ce peuple complètement créé par la colonisation, j’ai décidé de remettre cela en question et de travailler sur cela. »
Les initiatives se multiplient aussi du Maghreb à l’Afrique du Sud : musée Al Maaden à Marrakech lancé par la compagnie immobilière Alliances, centre d’art de l’artiste camerounais Barthélémy Toguo, fondation Donwahi à Abidjan, Centre Arts et Cultures à Cotonou soutenu par la galerie Vallois, Biennale de Dak’Art… Pour autant le marché reste émergent.
Avec son focus, (une vingtaine de galeries) particulièrement réussi sur l’art contemporain africain confié à l’Art Paris Art Fair sait séduire, innover et même porter un vrai regard aux multiples découvertes.
Avec la multiplication des événements consacrés à l’art venu d’Afrique, la scène artistique française pourrait se croire avant-garde dans la matière. Mais, à l’instar de Mohau Modisakeng et son travail sur la violence infligée aux corps noirs, un artiste qui représentera l’Afrique du Sud à la prochaine Biennale de Venise et qui est montré pour la première fois en France grâce à la galerie Whatiftheworld, la commissaire Marie-Ann Yemsi rappelle que la France est plutôt en retard par rapport à d’autres pays comme les États-Unis, le Royaume-Uni ou l’Allemagne. Même Africa Remix, l’exposition légendaire de 2004, conçue comme Afriques Capitales par Simon Njami, a été d’abord montrée à Düsseldorf en Allemagne, avant d’atterrir à Londres et Paris :
« Comme j’ai des origines allemandes – je suis née en Allemagne, mon père est camerounais et je vis en France où j’ai étudié – je peux assez bien percevoir les différences. D’une manière assez incroyable, la France a beaucoup de retard et elle a beaucoup de mal à faire face à l’histoire. Je pense que l’Allemagne a entrepris ce regard et a pris conscience de sa responsabilité, y compris dans l’histoire coloniale. Cela l’a libérée et l’a permis à regarder ce continent autrement. C’est vrai, énormément d’initiatives et de regards sur ces artistes et de projets ont lieu en Allemagne. Ce qui fait que l’Allemagne a certainement une longueur d’avance par rapport à la France. »
PHOTOS: BM / IMPACT EUROPEAN – WPA
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